Rationalité et irrationalité
Les éléphants anticipent très bien les tsunamis. Autre formulation : ils spéculent bien, contrairement à d’autres animaux, en particulier ceux de l’espèce humaine…
Il en est de même pour les marchés financiers : les bons spéculateurs, ceux qui ont vu loin et juste, qui ont bien anticipé l’évolution des marchés, ont acheté de l’or à $430 en août 2005 pour le revendre à $1 000 à la mi-mars 2008 (+ 130 % !) lors du retournement des marchés que j’avais alors bien identifié (c’était déjà pour les journaleux et les bonimenteurs la pire crise depuis celle des années 30, celle des sub-prime).
Ils ont acheté des Treasuries et en particulier des Notes à 10 ans quand les rendements étaient au plus haut à 5,30 % en juin 2007 (et les prix au plus bas) avant le collapsus que j’avais prédit depuis longtemps, pour les revendre quand les rendements étaient au plus bas à 2,06 % le 18 décembre 2008 (et les prix au plus haut) pour acheter des actions sous valorisées à haute rentabilité (EPR).
Les bons spéculateurs sont rationnels, les marchés ne le sont pas.
La destruction créatrice continue dans les banques américaines : leurs capitaux propres augmentent et leurs dettes baissent, leur multiplicateur d’endettement µ baisse encore à 10 ou en dessous alors que celui des banques françaises est encore et toujours à 34 et même à 44 pour la BNP d’après les rares informations disponibles.
Milliards, au 20/01
| P
| PER
| Cap prop
| Dettes
| µ
|
JPMorgan
| 85,2
| 23,00
| 167,0
| 2 008
| 12,0
|
Wells Fargo
| 62,1
| 9,21
| 47,0
| 575
| 12,2
|
Bank of America
| 36,0
| 11,51
| 177,0
| 1 640
| 9,3
|
US Bancorp
| 32,1
| 9,19
| 21,7
| 225
| 10,4
|
Citigroup
| 19,1
|
| 150,8
| 1 794
| 11,9
|
BNP
| 24,1
|
| 40,0
| 1 761
| 44,0
|
Crédit Agricole
| 17,4
|
| 41,4
| 1 424
| 34,4
|
Société Générale
| 16,5
|
| 29,9
| 1 035
| 34,6
|
Les grandes banques américaines ne sont plus très grandes : seule JPMorgan a plus de $2 000 milliards de dettes totales, Citigroup vient d’être scindée.
En cas de défaillance de l’une d’elles, les risques sont faibles car elles sont relativement petites par rapport à l’économie américaine.
En France, un tsunami dévastateur peut se produire à tout moment à cause de l’hypertrophie de la masse monétaire, surtout avec des banques dont les comptes ne donnent pas une image fidèle de la réalité (elles cachent des cadavres) et avec des dettes totales qui dépassent le PIB pour la BNP et qui représentent 2,6 fois le PIB pour les 3 grandes.
Les éléphants ont senti venir ce tsunami : les bons spéculateurs ont délaissé ces valeurs bancaires et les bons du Trésor français dont les rendements continuent à augmenter par rapport aux bons de l’Allemagne et des États-Unis.
La BCE maintient la zone euro sous perfusion avec des taux relativement élevés par rapport à ceux de la Fed, car en les baissant à zéro, l’euro s’écroulerait par rapport au dollar, ce qui déclencherait certainement ce tsunami.
Avec une monnaie surévaluée en circulation en France, les entreprises ne peuvent plus être compétitives, surtout dans l’industrie.
Les plans successifs de Sarko & Co. ne servent à rien : c’est remplir un tonneau des Danaïdes.
Ce qu’ils voient, ce sont des aides à l’industrie, ce qu’ils ne voient pas, ce sont les dettes publiques qui s’accumulent alors qu’il faudrait diminuer le taux des prélèvements obligatoires et sortir de l’Euro-système pour relancer la croissance.
Les dirigeants américains sont rationnels, les Français dans l’irrationalité.
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Lire mes billets précédents au sujet des banques, du 19 octobre 2008 au 5 novembre...
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