Libéraliser les retraites
Retraite par répartition ou par fonds de pension ? Comment se posent les problèmes ?
Quelle est la meilleure solution ? Pourquoi ? Que faire ? Qu'aurait-il fallu faire ?
L'essentiel…
Dans un système de retraite par fonds de pension, l'épargne destinée à la retraite génère des revenus supplémentaires à l'avenir car elle est investie.
L'incitation au travail de chaque individu est le meilleur moyen d'atteindre l'optimum des potentialités de chacun, et donc de tout le monde.
Il faut supprimer l'obligation de cotiser à des organismes publics par répartition.
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Individuel ou collectif ?
Le type de régime de retraite dit par répartition a été adopté en France au sortir de la Seconde guerre mondiale sous l'influence des communistes qui étaient alors très puissants dans les syndicats et les partis politiques.
L'URSS a fait faillite, mais paradoxalement ce type de retraite survit.
Un système de retraite par capitalisation a pourtant bien fonctionné spontanément et naturellement pendant des millénaires partout dans le monde…
Tous les Français savent que le laboureur de La Fontaine travaillait beaucoup tout au long de sa vie pour devenir l'heureux propriétaire de biens lui permettant de mieux vivre, puis de les transmettre à ses enfants, qui les exploitant eux-mêmes en tiraient ensuite des revenus (supérieurs à ceux de leurs parents) pour eux-mêmes et pour faire vivre leurs parents devenus trop âgés pour travailler et subvenir eux-mêmes à leurs besoins.
Si le laboureur de La Fontaine travaillait beaucoup pour vivre, le paysan de Böhm-Bawerk cherchait à augmenter ses revenus par des gains de productivité en perfectionnant ses moyens de production, c'est à dire en investissant et en innovant.
En France et partout dans le monde, les populations essentiellement constituées de paysans, ont spontanément et naturellement adopté depuis la nuit des temps ces solutions libérales.
L'incitation au travail est le meilleur (et finalement le seul) moyen d'atteindre l'optimum des potentialités de chaque individu.
En effet, il n'existe que deux solutions pour accroître la richesse de tout le monde et donc de la nation : augmenter la quantité de travail (c'est la solution adoptée par le laboureur de La Fontaine qui travaille et prend de la peine), et augmenter la productivité grâce à des investissements et à des innovations, c'est la solution du paysan de Böhm-Bawerk.
Dans les deux cas, les individus sont incités à produire davantage, d'abord pour eux-mêmes (pour mieux vivre car les conditions étaient dures à cette époque), pour que leurs enfants puissent bénéficier de meilleures conditions de vie que celles qu'ils ont connues, et pour qu'eux-mêmes enfin puissent vivre normalement pendant les dernières années de leur vie.
Si tous les individus procèdent ainsi, alors la croissance atteint son potentiel optimal et tout le monde en tire des avantages supplémentaires.
Toute autre solution est moins performante.
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Consommation ou investissement ?
Dans un système de retraite publique par répartition, les salariés paient des cotisations obligatoires.
Ils ne dépensent pas la totalité de leurs revenus : leur épargne est forcée pour assurer des revenus aux retraités qui les dépensent.
Les revenus primaires issus du travail des salariés sont redistribués et transformés en consommation finale.
Dans un tel système, il y a donc un transfert de consommation du cotisant au retraité.
Il n'y a pas véritablement d'épargne ni d'investissement.
L'effet d'entraînement est inexistant car cette apparence d'épargne est en fait transformée en consommation immédiate.
Le retraité est donc un dépenseur qui… dépense la non-consommation forcée (qui n'a que l'apparence d'une épargne) du cotisant.
Les prélèvements de retraite sont donc une fausse épargne pour le cotisant, et une véritable consommation réelle pour le retraité.
Dans un régime de retraite basé sur des fonds de pension, l'épargne-retraite est investie, ce qui permet de financer des innovations réelles (générant des gains de productivité) et des augmentations de capacités réelles de production c'est à dire des possibilités supplémentaires de production et donc des revenus plus élevés distribués à l'avenir.
A l'instar du laboureur et du paysan, le salarié qui épargne pour constituer sa retraite est un investisseur qui optimise son épargne et les revenus qu'il tire de son travail et de ses investissements, pour son avenir.
L'adoption d'un système de retraite basé sur des fonds de pension permettrait de restaurer une logique économique élémentaire : épargner aujourd'hui en consommant moins pour disposer de revenus supplémentaires à l'avenir grâce à des investissements judicieux faits par des individus bons gestionnaires de leurs propres affaires, et par un système qui introduit une dose nécessaire de mutualisation.
Un système de retraite par des fonds de pension possède une dynamique qui le rend beaucoup plus performant que tout autre système.
Il aurait donc fallu ne pas adopter un régime de retraite par répartition après la Seconde guerre mondiale, et créer des fonds de pension au plus tôt, ce qui n'a pas été fait en France sous la pression des syndicats et des partis politiques de gauche qui se sont succédé au pouvoir depuis des décennies…
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Et maintenant, que faire ?
Il faudrait que les Français, c'est à dire les actifs et les retraités qui sont par ailleurs des électeurs prennent conscience que ce régime de retraite par répartition n'est pas efficient et qu'il faut impérativement le supprimer au plus tôt pour créer des fonds de pension.
Il faudrait qu'un homme politique comme Reagan inspiré par un économiste comme Bastiat lance un mouvement de libéralisation du système des retraites.
Si des hommes politiques veulent faire quelque chose pour nos retraites, c'est à dire pour augmenter notre niveau de vie : qu'ils ne fassent rien ! Ce serait déjà un très net progrès par rapport à la situation actuelle…
Pour cela il suffirait de laisser les gens libres de choisir les solutions qu'ils préfèrent adopter (travailler comme ils le veulent 35, 40, ou 45 heures par semaine, sans prendre de vacances ou en prenant 1, 2 ou 3 mois de congés, en arrêtant de travailler à 55, 60 ou 65 ans, etc), ne pas pénaliser les revenus du travail destinés à financer leur retraite en créant des comptes entièrement défiscalisés comme le compte 401(k) aux Etats-Unis, pour financer leur retraite.
Ainsi, l'application du libéralisme pourrait améliorer nos conditions de vie, mais il existe des résistances très fortes à de tels changements.
Le socialisme a créé des dégâts considérables dans les pays qui l'ont mis en pratique au XX° siècle.
Les régimes de retraite par répartition sont au XXI° siècle le dernier grand vestige de ce socialisme et un obstacle important à la croissance économique.
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Effet boule de neige
Un effet boule de neige analogue à celui qui fonctionne dans les entreprises dynamise les revenus tirés de l'épargne retraite placée dans des fonds de pension.
Dans une entreprise, les bénéfices de l'année passée ont permis d'investir et donc d'augmenter les bénéfices actuels qui permettent d'investir maintenant pour augmenter les bénéfices futurs, et ainsi de suite…
Dans un système de retraite par fonds de pension, les salariés du XXI° siècle sont incités à travailler comme les paysans dans l'ancien temps, à épargner et à placer cette épargne en l'investissant, jadis dans des biens fonciers, maintenant dans des produits financiers.
Ces revenus permettent d'accroître d'année en année le capital de chaque épargnant et chaque personne peut ainsi tirer des revenus au cours de sa vie active au mieux de ses intérêts comme les paysans l'ont toujours fait spontanément et naturellement.
Liberté et responsabilité, tels sont les principes sur lesquels reposent les fonds de pension.
L'effet boule de neige ne doit pas être interrompu en passant d'une génération à une autre : les parents doivent pouvoir transmettre à leurs héritiers la totalité de leur capital personnel.
Il est donc indispensable de supprimer les droits de succession.
Le système actuellement en vigueur en France est scandaleusement injuste et anti-social car le décès prématuré d'un ancien salarié aux revenus modestes dans les premières années de sa retraite prive ses héritiers du produit de toutes les cotisations qu'il aura versées au cours de sa vie.
En outre, les droits de succession empêchent généralement ses héritiers de disposer du capital qu'il peut néanmoins léguer, ce qui achève de briser l'effet boule de neige.
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Destruction créatrice
Dans un système de retraite par fonds de pension, les placements les moins rentables sont éliminés au profit de ceux qui présentent des perspectives plus rémunératrices, ce qui accélère le processus de destruction créatrice de Schumpeter et l'espérance de gains pour les investisseurs (un mouvement brownien élimine le capital des entreprises en déclin et augmente celui des entreprises en croissance).
Les utilisateurs de fonds de pension bénéficient de cette dynamique et obtiennent une rentabilité de leurs capitaux investis (qui financent par ailleurs le développement des entreprises) plus élevée que les pensions d'un système de retraite par répartition selon toutes les sources concordantes.
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Répartition et capitalisation
Un régime de retraite par répartition peut cacher une gestion par capitalisation qui n'est pas efficace.
En effet, en France la gestion des capitaux des caisses publiques de retraite par leurs dirigeants (irresponsables) est catastrophique.
Les épargnants et leurs représentants sont les mieux placés pour gérer au mieux eux-mêmes (ou par leurs représentants) leur épargne personnelle comme les paysans comptaient jadis sur leurs propres forces pour constituer leur capital.
Les salariés du XXI° siècle doivent faire de même.
Cependant, les Américains confient la gestion d'une partie de leur épargne retraite à des fonds de pension en concurrence. Bien gérés, ils sont généralement performants car leurs gérants le sont aussi...
Les communistes nous ont légué une bombe à retardement colossale et leurs méfaits vont se prolonger pendant tout le XXI° siècle.
Les salariés, surtout ceux qui disposent de revenus modestes et qui constituent par ailleurs la majorité des électeurs, sont les premiers responsables et les premières victimes de leurs erreurs d'analyse économique.
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Capital et capitalisation
En investissant leurs capitaux, les fonds de pension des salariés américains permettent de capitaliser les entreprises qui bénéficient largement de ce dispositif.
Elles sont relativement peu endettées. Elles supportent donc des charges financières réduites et dégagent des bénéfices importants tout en payant des salaires élevés, ce qui est avantageux pour tout le monde.
Ces fonds de pension américains ont également investi en dehors des Etats-Unis dans un souci de diversification pour profiter légitimement de l'opportunité de gains, en particulier en Europe. Ainsi ces fonds ont acquis une part importante de la capitalisation d'entreprises européennes.
Il est surprenant de constater que les Français reprochent aux Américains ces investissements alors qu'ils pourraient faire de même … conformément aux directives européennes adoptées depuis 1992. La faible croissance des nations européennes serait ainsi stimulée.
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Volet social
La durée d'une vie de travail doit se dérouler sur 45 années au minimum.
L'évolution des techniques depuis plus d'un siècle fait que le travail est de moins en moins pénible physiquement en général.
Au début du XX° siècle, les hommes étaient majoritairement paysans ou ouvriers. Ils effectuaient donc un travail épuisant qui ne leur permettait plus d'être productifs au delà de 65 ans.
Il n'en est plus de même au XXI° siècle : la plupart des personnes actives travaillent dans des bureaux ou conduisent des machines qui ne demandent que peu d'efforts physiques.
La vie professionnelle peut se dérouler facilement au delà de 65 ans dans la plupart des professions.
Cependant, il subsistera toujours des métiers qui nécessitent des efforts physiques importants. C'est alors à l'Etat, au titre de la solidarité nationale, de prendre des dispositions marginales de façon à prendre en charge les surcoûts engendrés par la mise en place d'un système compensant les désavantages subis par les travailleurs manuels qui ne peuvent plus travailler au delà d'un certain âge. Ils pourraient alors bénéficier prioritairement d'emplois peu pénibles physiquement et de conditions avantageuses pour disposer de revenus complémentaires pendant leur retraite.
Il en est de même pour toutes les personnes qui souffrent de divers problèmes qui les empêchent de pouvoir travailler normalement au cours de leur vie et de se constituer un capital pour financer leur retraite complémentaire.
Ces dispositions doivent rester marginales. Elles sont légitimes dans le cadre du libéralisme.
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Libéraliser les retraites
Un système de retraite efficient repose sur des fonds de pension complétés par un compte individuel d'épargne retraite entièrement défiscalisé transmissible aux héritiers sans impôts ni taxes, ce compte (géré par son titulaire ou par ses représentants) pouvant recevoir tous produits financiers eux-mêmes défiscalisés comme par exemple des bons d'emprunts privés et publics, et des actions assorties de dividendes issus de bénéfices non soumis à l'impôt sur les sociétés.
Des améliorations peuvent être apportées à ce dispositif comme par exemple la possibilité donnée à l'employeur d'abonder le compte en dehors de toute imposition.
Un tel système de retraite existe aux Etats-Unis avec le compte 401(k) d'épargne retraite défiscalisé mais le taux d'imposition sur les bénéfices, proche de 40 % pénalise ce genre de placement et réduit sa dynamique.
En outre, pour faciliter l'épargne et l'activité investies dans un capital immobilier, les impôts et taxes perçus lors de son acquisition et de sa cession doivent être supprimés.
La diminution attendue de ces recettes fiscales serait rapidement compensée par les rentrées provenant de ce supplément d'activité.
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Equations keynésiennes…
Dans la plus pure théorie keynésienne (!), dans un régime de retraite par répartition, le revenu Rs du salarié cotisant est consommé Cs et épargné Ss, mais en fait l’épargne est prélevée presque en totalité pour payer ses cotisations retraite : Rs = Cs + Ss
Le revenu Rr du retraité est tiré de l'épargne du salarié Ss : Rr = Ss
Le retraité consomme Cr son revenu : Rr = Cr
L'épargne véritable Ss du salarié est donc quasiment nulle : Ss = 0
Il n'y a presque pas d'investissement : I = 0
Dans un système de retraite par fonds de pension, la partie non consommé Cs du revenu Rs du salarié est épargnée Ss : Rs = Cs + Ss
L'épargne est investie : Ss = I
Elle finance des investissements qui permettront de créer des richesses supplémentaires qui donneront alors la possibilité de payer des pensions plus élevées aux retraités à l'avenir.
Dans tout régime de retraite, que ce soit par répartition ou par investissement mutualisé de l'épargne, les versements représentent environ 15 % des revenus.
Si un régime de retraite par capitalisation avait été adopté en France à la place du régime de retraite par répartition, une épargne égale à 15 % des revenus aurait pu être dégagée et affectée aux investissements productifs chaque année.
C'est ce qu'ont fait les Américains, et c'est ce qui explique en partie leur richesse…
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Article écrit en janvier 2003 révisé en novembre 2007
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