Déclin de la culture économique
Alan Greenspan a déclaré à maintes reprises que les marchés devraient mieux fonctionner à l’avenir (donc avec moins de volatilité et davantage de rationalité) parce que les investisseurs devraient avoir de meilleures connaissances économiques au fil du temps.
Il s’est lourdement trompé sur ce point !
Le déclin de la culture économique est très marqué, surtout en Europe depuis l’adoption de l’euro…
Avant, du temps du système de Bretton Woods, tout le monde savait, y compris l’homme de la rue et la ménagère (!), qu’un pays était condamné à dévaluer (sa monnaie) quand les entreprises et la res publica étaient mal gérées.
C’est ce qui s’est passé pour le franc français un certain nombre de fois, en particulier par rapport au Deutschemark.
Ensuite, lorsque le franc français est entré dans un système de changes libres, les parités ont évolué naturellement et spontanément en fonction de la bonne et de la mauvaise gestion des affaires en France par rapport à ses partenaires, ce qui obligeait tout le monde à réagir correctement pour rétablir une situation saine en cas de débordements potentiellement dangereux.
Tout le monde comprenait (plus ou moins bien) ces problèmes. Maintenant, c’est l’incompréhension la plus totale, les délires les plus extravagants ayant le plus de succès !
De petites mises au point rapides sont nécessaires…
D’abord, les banques centrales et les banques ordinaires ne créent pas de monnaie, normalement du moins, sauf quelques cas extraordinaires comme par exemple au Zimbabwe.
En effet, dans tous les pays, les règles comptables sont (à peu près) bien respectées (en dehors de quelques exceptions comme par exemple en France et dans d’autres pays où les engagements de retraite ne sont pas comptabilisés à leur juste valeur).
Dans chaque pays, la banque centrale établit la balance des paiements, et toutes les banques centrales sont en relation entre elles par l’intermédiaire de la Banque des Règlements Internationaux (BRI, Bank for International Settlements, BIS).
Elles doivent toutes avoir à tout moment une position nette créditrice vis-à-vis de la BRI.
Compte tenu de ces règles, le système bancaire mondial est parfaitement bien organisé et son fonctionnement est pérenne (cf. mon autre billet à ce sujet, Balances des paiements et équilibres systémiques du 15 avril, cliquer ici pour le lire).
Dans la zone euro, le gros problème vient du fait que les déficits qui se sont produits dans ces cochons de pays du Club Med ont été compensés par les excédents, en particulier de l’Allemagne, ce qui a occulté la gravité de ces déséquilibres.
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Les banques européennes qui sont du ressort de la BCE peuvent acheter librement des dollars (des États-Unis) sur les marchés… tant qu’il existe des dollars dans ses comptes ! et pour cela, il faut que des dollars aient été engrangés dans la zone euro à la suite du commerce international (grâce à une balance commerciale excédentaire avec des exportations supérieures aux importations), d’investissements directs nets excédentaires et (ou) en portefeuille, sinon, la BCE est obligée de puiser dans ses réserves (en devises), et quand il n’y en a plus, soit la BCE est en rupture de paiement, soit elle est obligée d’emprunter temporairement à très court terme (par des accords de swaps en particulier) ou à un terme supérieur, ce qui donne une mauvaise image négative de bateau à la dérive.
En ce joli mois de mai, c’est ce qui vient de se passer : la BCE a été le jeudi 6 mai pendant quelques minutes en défaut (dit technique) de paiement, rattrapé en quelques minutes par des interventions d’urgence (a priori de la Fed), le tout étant officialisé sous la forme de la réactivation d’accords de swaps le dimanche 9 mai (mise à disposition temporaire de devises entre banques centrales) pour éviter un endettement net officiel et public de la zone euro vis-à-vis des autres banques centrales (car les dirigeants euro-zonards espèrent sauver les meubles dans les semaines et les mois à venir).
La Balance des paiements tenue par la Banque de France est dans une situation nette négative (ainsi que les balances de ces cochons de pays du Club Med), mais comme l’Allemagne accumule les excédents des balances commerciales et des capitaux, la BCE avait des réserves en devises lui permettant de faire face à ces obligations, ce qui n’a plus été le cas en ce début de mois de mai du fait que les investisseurs avisés ont retiré massivement leurs capitaux de la zone euro.
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La richesse augmente dans le monde depuis des décennies grâce aux gains de productivité. Les dépôts d’argent augmentent donc dans les banques, et comme le disait fort justement ce bon vieux Keynes, l’optimum économique est obtenu lorsque cet argent est prêté.
Dans ces conditions, il est normal que les dettes augmentent. Tout le système bancaire dans tous les pays est équilibré tant que les règles de base sont respectées.
Ce bon vieux Greenspan répétait toujours ces évidences quand il présidait la Fed…
Les problèmes commencent quand les règles ne sont pas respectées et (ou) quand elles ne sont pas adaptées aux circonstances.
Actuellement, beaucoup d’Etats (surtout en Europe, en dehors de l’Helvétie) ne respectent pas la règle de l’endettement maximum de 60 % du PIB, ce qui contribue à les affaiblir à terme.
Par ailleurs, les pays où les engagements de retraite ne sont pas comptabilisés à leur juste valeur créent de ce fait de l’argent non gagné, ce qui est très grave car l’argent sain est le premier pilier des Reaganomics.
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